À Saulchery, non loin de Château-Thierry, Laurent Pierre, a de grandes ambitions pour son vin de champagne. Pour ce passionné d’histoire, moderniser la tradition n’a rien d’iconoclaste. C’est une mission nécessaire.
C’est important l’envers du décor, la machinerie, les rouages invisibles. Montrer ne démystifie pas. Au contraire, « voir c’est comprendre, assure Laurent Pierre. Dans mon cas, ça crédibilise un métier longtemps recroquevillé sur lui-même. » Si le vin de champagne est un monolithe élitiste, alors certains vignerons comme lui en poncent les contours pour le rendre plus accessible. En 2019, Laurent a accueilli près de 500 visiteurs au cœur de l’exploitation familiale dont il incarne la 5ème génération avec bagout. Que leur a-t-il appris qu’ils ne savaient déjà ? Peut-être que la taille de 5 hectares de vigne représente 1000 heures de travail. Ou encore qu’une vigne se renouvelle tous les quarante ans ? Ou qu’il faut plus d’un kilo de raisin pour obtenir une bouteille de 75 cl ? À Saulchery, petit village situé à dix kilomètres au sud-ouest de Château-Thierry, le vigneron commercialise chaque année l’équivalent de 8000 bouteilles. Laissant ainsi échapper l’information principale. « Nous sommes dans les Hauts-de-France. Ça, les gens l’ignorent. »
Se faire connaître
Représentant des viticulteurs de l’Aisne au sein de la Maison du tourisme de Château-Thierry, Laurent Pierre fait partie de cette nouvelle génération de vignerons dynamiques. En 2019, année où son domaine fut certifié Haute Valeur Environnementale, le trentenaire marie art et vin en habillant certains de ses millésimes 2010 d’un film thermoformé. Un champ de coquelicots du peintre Philippe De Lestrange, de Sakura de l’artiste japonaise MiuShinoda. Deux modèles présents dans sa salle de dégustation totalement rénovée en 2020. « C’est primordial de recevoir dans de bonnes conditions. Le champagne doit rester un moment de partage. L’art du bien vivre à la française. »
En temps normal, Laurent participe à une dizaine de salons par an. Parmi eux, les célèbres vendanges de Montmartre qui attirent près de 100 000 personnes sur trois jours. Même si l’heure n’est pas à la fête compte-tenu du climat sanitaire mondial, le viticulteur reste optimiste. « Les trois dernières récoltes ont été très bonnes. À nous de redoubler d’inventivité pour nous faire connaître. » Pour la Saint-Valentin, son épouse a ainsi confectionné des bracelets vendus avec ses bouteilles.
Le champagne doit rester un moment de partage. L’art du bien vivre à la française.
Laurent Pierre
Un produit de la nature
Passionné d’histoire, Laurent laboure le champ des possibles tel un solide Percheron qui, il y a encore quelques décennies, sillonnait les terres de ses propres aïeux. Pour lui, l’œnotourisme est une bénédiction. Un trésor patrimonial à découvrir sur place – rien de tel pour un néophyte que d’arpenter les coteaux ou de participer aux vendanges -et à exporter. Pour ouvrir le marché à l’est, Laurent a récemment créé une cuvée spéciale Pologne, de rouge et de blanc vêtue. Et pour bien montrer l’étendue du métier, il n’hésite pas non plus à mettre en avant son Ratafia. Un apéritif « qui ne représente certes qu’un petit pourcent des ventes mais tellement authentique qu’on aurait tord de ne pas le citer. » Mais là ne s’arrête pas la mission de cet amoureux de la nature.
En novembre dernier, le viticulteur a planté quelques châtaigniers adultes. Cet automne, ils donneront des dizaines de kilos de ce fruit « sans gluten et plein de vitamine C. » Coup de chance, la châtaigne se marie parfaitement avec une flûte de champagne. À trois lettres près, les deux mots sont d’ailleurs identiques. Il n’y a pas de hasard.
Champagne PIERRE Laurent,
23, rue de Perpeigneux – 02 310 Saulchery.
Tél. : 06 22 91 23 39 – www.champagnepierrelaurent.fr
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Instagram Pierre Laurent Champagne
Texte et photos : Joffrey Levalleux
